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S’approprier les réseaux sociaux autrement

Publié le 09/06/2020 | par Christophe Reibel

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Julien Kauffmann
Marie-Thérèse Barthelmé et Pauline, sa nièce. Leur recette de clafoutis aux cerises a fait un tabac chez les personnes qui suivent le domaine sur les réseaux sociaux.

Le confinement a fait envisager aux metteurs en marché une autre manière de communiquer sur eux et leur offre sur les réseaux sociaux. La vidéo en sort vainqueur.

Deux mois de confinement ont poussé des opérateurs alsaciens à réinventer leur présence sur le web, essentiellement via Facebook et Instagram, parfois également Twitter. « Le confinement est une période qui se prête à l’introspection. Beaucoup de vignerons se sont emparés des réseaux sociaux de manière plus intime. Ils n’ont pas fait dans l’héroïsme ou dans l’angoisse de ne voir sortir aucune bouteille. Ils se sont racontés, personnellement. C’est nouveau pour l’Alsace », décrit Aurélia Sovic, chargée des relations presse France au Civa. Concrètement, beaucoup de viticulteurs ont expliqué la complexité de leur métier pour qu’il paraisse « un peu moins lointain » aux personnes qui les suivent. « Les messages sont moins rodés, moins lisses. Ils sont plus en rapport avec des gens qui veulent entendre un discours de vérité », poursuit Aurélia. Dans le contexte étrange créé par le confinement, il y a eu la volonté de rester positif, de conserver un côté humain aux relations. Jessica Ouellet, du domaine des Marronniers à Andlau, a par exemple réalisé des pastilles intitulées « Le vin expliqué aux nuls ». Elle y montre comment on tient un verre et révèle pourquoi le crémant est servi dans une flûte. « Cela n’a l’air de rien, mais ça a été très apprécié », remarque Aurélia.

 

 

« Avant, je postais des messages du genre : « Les vins de la cave de Ribeauvillé à Houston, Boston ou Tokyo ». Là, j’ai montré ce qui se passait en interne dans l’entreprise, que les viticulteurs, comme la nature, ne s’arrêtent pas, que les abeilles pollinisent et que les coccinelles mangent des nuisibles », indique David Jaeglé, responsable commercial export de la coopérative. Pour lui, le temps est venu de s’orienter vers « une communication plus sélective ». Il s’est déjà mis en scène pour une dégustation filmée avec un interlocuteur de San Francisco à qui il a parlé des nouveaux vins de la cave, une manière de nouer un lien « régulier et plus efficace ». D’ici cet été, des vidéos courtes de quinze à vingt secondes doivent donner rendez-vous sur le site de la cave. L’internaute aura accès à du son et à de l’image sous-titrée en plusieurs langues, 90 % des vidéos originales devant être tournées en anglais. « Tous ces outils amènent des explications plus ou moins techniques, selon le média social, personnifient un produit. Ils sont un complément au voyage. Je ne pense pas qu’ils le remplaceront. »

 

 

« Une nouvelle manière de vendre »

À Wettolsheim, deux domaines ont déjà tourné leurs premières images. « Nos vidéos font d’une à trois minutes. Leur objectif est d’aller vers les gens en leur montrant les travaux de saison et ceux qui les réalisent. L’équipe s’est filmée elle-même, dans les parcelles où elle se sentait le mieux. Un petit jeu de questions/réponses et un vin sont associés à chaque épisode. Cela a beaucoup plu et a créé de la proximité », raconte Anne-Catherine Le Goff, chargée du développement commercial et du marketing au domaine Barmès-Buecher. Ces vidéos ont généré de nombreux échanges. Des influenceurs ont pris contact. Sophie Barmès a dégusté et commenté ses vins, pour et avec eux, après envoi d’une quarantaine de bouteilles échantillons concernant deux à trois ou cinq à six vins. Ces séances ont été suivies par des assistances atteignant la centaine de participants pour les meilleures. Le nombre d’abonnés sur Facebook et Instagram en a profité. Des commandes portant plutôt sur des grands crus, du pinot noir, des vendanges tardives sont arrivées du Danemark, de Suède. « C’est une nouvelle manière de vendre, plus facile que de réunir tout le monde sur place et avec moins de frais. Elle va compléter le déplacement physique », juge Anne-Catherine.

 

 

Le domaine Albert Mann a, pour sa part, publié des photos d’oisillons tout juste éclos, de liage ou de reconstruction d’un mur en pierres sèches, mais il s’est surtout lancé une fois par semaine dans la publication de recettes de saison filmées. « Celle du clafoutis réalisée par Pauline, ma nièce, a fait un tabac ! Nous l’avons accompagné d’un pinot gris Altenbourg vendanges tardives 2015 », raconte Marie-Thérèse Barthelmé. « Il s’agit de petits formats sympathiques qui nous procurent des retours très positifs de la part de nos relations en France, comme à l’étranger. Nous allons continuer de nous rappeler à leur attention régulièrement car spontanément on ne pense pas forcément à l’Alsace. » Le domaine a également organisé des apéritifs en direct via une application de visioconférence. Chaque participant choisissait un vin de sa cave et l’échange avait lieu. « Nous avons passé comme ça une heure sur le pinot noir », indique Marie-Thérèse. « J’aimerais que ce type de relations persiste à l’avenir. Le contact physique est important mais l’animation à distance peut se substituer au déplacement. C’est mieux pour la planète. Il serait dommage que le confinement ne permette pas de prendre de nouvelles habitudes. »

 

« Ne pas s’arrêter d’investir maintenant »

Le Civa a remplacé sans surprise ses événements grand public ou professionnels par du virtuel. Il a proposé une dégustation quotidienne à des sommeliers américains ou britanniques au chômage forcé. Concrètement, soit le professionnel s’est fourni là où il se trouvait, soit des échantillons lui ont été envoyés. L’échange a ensuite pu se faire normalement par écran interposé. « L’objectif est de ne pas perdre de terrain. Certains ont arrêté leurs investissements aux États-Unis. Le Civa est d’avis qu’il faut justement être présent maintenant », analyse Foulques Aulagnon, responsable marketing export du Civa. « Une fois la situation stabilisée et l’économie en phase de redémarrage, l’importateur devra avoir l’Alsace à l’esprit. Attendre octobre ou novembre pour faire de la promotion sera trop tardif car cela correspond à la période de déconfinement lorsque les revendeurs voudront écouler leurs stocks pour se faire de la trésorerie. Nous avons assisté au même phénomène lors de la crise de 2008-2009. »

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