Vigne

Édito

Solidaires et unis pour surmonter la crise

Publié le 29/04/2020

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Jean-Michel Hell
Il va donc falloir se serrer les coudes et, se préparer à une sortie de crise longue et douloureuse, prévient Jérôme Bauer, président de l'Ava.

Je rédige cet édito avec le cœur lourd. En effet, la crise sanitaire qui sévit en France, en Europe et dans le monde entier aura des conséquences catastrophiques ! La région alsacienne a déjà payé un lourd tribut, avec de nombreux décès. J’ai une pensée émue pour toutes les familles dans le deuil et la tristesse d’avoir perdu un proche. Comme quoi, un virus venu de Chine peut mettre à mal et déstabiliser nos vies et toute l’économie mondiale. Pour l’heure, l’essentiel est de garder la santé et d’éradiquer cette saloperie de virus.

Ensuite viendra le temps de la reconstruction économique.

Nous nous sommes dès le premier jour mis au travail. Il y avait un avant Covid-19, il y aura un après. Nos entreprises se retrouvent dans une situation économique catastrophique et totalement inédite. Le bureau de l’Ava se retrouve très régulièrement pour faire un point sur la situation et trouver des solutions pour amortir le choc. Nous sommes également très mobilisés aux côtés de la Cnaoc, pour porter nos propositions au plus haut niveau de l’État. Pas un jour ne se passe sans qu’il n’y ait d’échanges ou de courriers de revendication auprès des décideurs de toutes autorités ou organisations de l’environnement, parlementaires, préfectures et administrations, collectivités, banques…

L’État français a su réagir dans l’urgence, afin de proposer une bouffée d’oxygène en mettant en place plusieurs dispositifs : le report de paiement de nos charges sociales, le chômage partiel, la possibilité de décaler nos emprunts de six mois, la possibilité d’emprunter jusqu’à 25 % de notre chiffre d’affaires pour renflouer nos trésoreries, pour les plus fragiles un fonds de solidarité… (L’information vous a été diffusée au fur et à mesure via le réseau des présidents de syndicats viticoles. Les services de l’Ava restent à votre disposition de préférence par e-mail à info@ava-aoc.fr ou, sinon, par téléphone, au standard, même si le télétravail rend parfois les contacts plus compliqués, veuillez nous en excuser.) Mais toutes ces mesures ne suffiront pas pour éviter la faillite de nos entreprises… Il faudra un jour payer ces reports et rembourser nos dettes.

La situation économique de nos entreprises est très inquiétante : plus de vente directe, plus de salon, plus de CHR, l’export éteint… Les chiffres d’affaires s’effondrent, alors que les travaux dans les vignes continuent en générant des charges. Même la grande distribution qui voit pourtant son activité générale s’accroître, constate une diminution de la consommation de vin. Parallèlement, des contrats de vendeurs de raisin sont dénoncés, sans aucune proposition de structure pour les récupérer ; du raisin risque de ne pas trouver d’acquéreur. Le marché des vracs est inexistant, certaines caves sont encore pleines, alors que nous sommes à quelques mois de la future récolte. L’heure est grave ! Nous allons devoir consentir des efforts importants afin de limiter la casse ! Plus que jamais nous devons être solidaires et unis !

Il n’existe pas de réponse unique à ces maux et à cette crise sans précédent. Nous devons travailler sur différentes mesures, complémentaires et certaines plus importantes que d’autres. Le premier levier d’action est évidemment celui des conditions de production. Le consensus que nous avions trouvé avant la crise du Covid-19 n’est largement plus suffisant à l’équilibre de notre filière. Cependant cela ne doit pas être et n’est pas le seul moyen de réponse. Le rendement devra être assorti d’un blocage interprofessionnel. Nous devons obtenir la garantie du négoce de ne pas dénoncer de contrats et d’abandonner le système d’indexation afin d’enrayer la spirale vers le bas. Nous travaillons également au niveau national et européen sur un dispositif de distillation de crise afin d’assainir les stocks, mais pour l’instant rien n’est gagné à ce niveau.

Je l’ai dit, nous devrons consentir à de grands sacrifices pour sauver collectivement la filière ! Sinon les surstocks énormes en perspective seraient susceptibles de couler l’ensemble de la filière.

Nous travaillons également avec nos parlementaires, afin de mettre en place un abandon de charges sociales et patronales, des aides de défiscalisation, mais aussi l’abandon par les banques des intérêts intercalaires (lors de reports de prêt). Là aussi, c’est loin d’être gagné mais vous pouvez compter sur notre pugnacité et notre persévérance. Nous avons également sollicité la région afin qu’elle mette des moyens pour la relance économique de nos activités.

Le président de la République a annoncé l’enclenchement du déconfinement à partir du 11 mai. Mais ne croyez pas que l’activité économique va directement repartir à ce moment-là. J’aimerais être positif, mais je me dois d’être réaliste pour préparer au mieux la reconstruction ! L’hôtellerie, les bars, les cafés, la restauration ne reprendront leurs activités au mieux qu’en juillet. Les fêtes et festivals ne reprendront pas avant fin juillet si tout va bien… Les touristes regagneront-ils l’Alsace en sachant que nous sommes le premier foyer de l’épidémie de Covid-19 ? Presque tous les pays du monde sont en train de lutter contre cette crise sanitaire, ce qui ne laisse pas présager d’une reprise de l’export avant le mois de septembre. Nous n’avons malheureusement aucune visibilité sur le court terme.

Il va donc falloir se serrer les coudes et, se préparer à une sortie de crise longue et douloureuse. Il va aussi nous falloir être imaginatifs et repenser toute la structuration commerciale. Le chantier Alsace 2030 est quant à lui lancé, afin de repenser l’ensemble de notre filière.

Ensemble, nous surmonterons cette difficile épreuve et en sortirons plus forts que jamais !

Courage et force à toutes et tous.

 

Édito écrit par Jérôme Bauer, président de l’Association des viticulteurs d'Alsace (Ava)

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