Vie professionnelle

SAS ferme Prim’Vert à Michelbach-le-Haut

L’œuf : de la production à l’approvisionnement

Publié le 24/04/2020 | par Jean-Michel Hell

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André Bastady : « Nos différents partenariats nous ont permis de gagner en qualité, en fraîcheur et en proximité. »
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Au centre de conditionnement de la SAS Prim'Vert à Michelbach-le-Haut.
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Les trois bâtiments poulaillers.
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La ferme Prim’Vert calibre, emballe et commercialise environ 150 000 œufs par jour sur son site de Michelbach-le-Haut. Suivant la demande, cette capacité peut être augmentée. C’est le cas depuis le début de la crise sanitaire.

L’histoire de la ferme Prim’Vert commence en 1989 quand André Bastady rachète la petite ferme familiale. Il se marie avec Katia qui décide de le rejoindre sur l’exploitation. Le couple cultive alors plusieurs tonnes de persil, de roquette et de basilic en plein champ. « Des intempéries à répétition, notamment de la grêle, ont fragilisé financièrement l’exploitation et nous ont poussés à trouver une production et des revenus plus réguliers. C’est un ami qui m’a fait visiter une exploitation de poules pondeuses. C’est de là que vient l’idée de ce projet professionnel », explique André Bastady.

En 1994, démarre la construction d’un hangar et l’acquisition d’équipements d’occasion pour 1 000 poules pondeuses. Les œufs sont produits, emballés et vendus en Alsace et en Suisse. Puis, très vite, la clientèle se développe et la demande devient supérieure à la capacité de production. Cette croissance nécessite un nouveau poulailler de 5 000 poules en cage. « Cela correspondait à l’élevage classique de l’époque. Mais, déjà, nous voulions proposer des œufs de poules en plein air à notre clientèle. Finalement, nous avons obtenu, en 2002, le permis de construire pour réaliser une sortie d’exploitation comprenant un bâtiment de 6 500 poules pondeuses en plein air, un hangar de stockage et une maison d’habitation. Travailler sur deux sites était compliqué. Avec l’obligation de se mettre aux normes, l’arrêt du poulailler en cage est devenu une évidence », ajoute l’agriculteur.

Il y a dix ans, il décide d’investir dans la construction de deux nouveaux poulaillers d’élevage au sol et d’un centre de conditionnement performant, équipé d’une calibreuse « Moba », leader mondial. La capacité passe à 19 000 œufs/heure. L’agrément de conformité est obtenu en 2013. Des contrôles sont effectués toutes les six semaines. « Nous avons beaucoup investi. Nous avons également repris la production de Christian Mona et de Sébastien Stoessel, associés à Feldbach. Ainsi, nous avons pu proposer des œufs de poules élevées en plein air. Soit 15 000 supplémentaires », précise André Bastady. Chaque bâtiment a une surface de 900 mavec une turbine de 40 000 m3.

« Nous avons raccourci les distances »

Tous ces œufs sont vendus dans des boîtes de six ou de douze. Il a fallu pérenniser les débouchés. En temps normal, 20 % de ces œufs partent à l’export, essentiellement en Suisse. 50 % vont dans les grandes et moyennes surfaces de la région. Et 30 % vont à des boulangeries, pâtisseries, restaurants et hôtels. « Au départ pour les GMS, nous leur avons vendu un « concept » en faisant la promotion de la production locale en circuit court. Deux fois par semaine, nous nous rendons dans les magasins et nous faisons la mise en rayon. Nous faisons les rotations et nous reprenons les éventuels invendus. Le risque est nul pour eux », observe André Bastady. Après avoir intéressé les GMS du Sud Alsace, la ferme Prim’Vert a séduit à Mulhouse, Colmar puis, à Sélestat, via la ferme Kientz à Ebersheim.

Aujourd’hui, les œufs sont livrés sur toute l’Alsace, de Saint-Louis à Saverne. Pour y parvenir, la ferme Prim’Vert s’est assurée, par des contrats de partenariat, de pouvoir s’approvisionner auprès d’une dizaine de producteurs. « En 2017, on nous a demandé de développer une filière d’œufs bio d’Alsace. Quatre producteurs ont répondu favorablement : Jaegy à Largitzen, Meyer à Werentzhouse, Fulhaber à Balgau et Wendling à Lupstein. Ces différents partenariats nous ont permis de gagner en qualité, en fraîcheur et en proximité. Nous avons raccourci les distances. D’ailleurs, la demande est toujours plus forte. Il faut produire et approvisionner nos clients et partenaires tous les jours », note André Bastady. La construction du centre de conditionnement à Michelbach-le-Haut a été une réponse efficace à cette demande.

C’est dans ce bâtiment, que les œufs arrivent sur palettes. Ils sont posés sur un convoyeur où ils sont vérifiés, pesés, photographiés, marqués avant d’être triés automatiquement par gabarit et déposés dans les emballages. « Chaque œuf est photographié 24 fois. Nous sommes capables de faire 40 catégories différentes. Des œufs les plus propres jusqu’aux plus sales dans leurs aspects extérieurs. On met entre 120 et 160 impacts sur chaque œuf pour définir s’il y a une microfissure. Cet impact, c’est une bille en acier qui tape sur l’œuf qui permet d’écouter le son produit et de savoir si la coquille est fêlée. Les œufs sont pesés, désinfectés à l’ultra-violet pour enlever le reste des germes qui s’y trouvent. Ils sont mesurés à leur sortie comme à leur entrée dans le processus. S’il y a une différence, ils sont détruits. Nous les scannons. Ils sont tracés avec le code du producteur, et avec la date de production. Ce processus permet d’assurer une totale traçabilité. Chaque soir, les machines sont lavées de façon autonome. Elles sont également désinfectées. Nous nous sommes donné les moyens de faire quelque chose de bien grâce à des machines de qualité », se félicite André Bastady. Les œufs sont cherchés la nuit, de minuit à six heures du matin chez les producteurs. Le travail au centre de conditionnement s’effectue ensuite jusqu’à 15 h, puis les premiers camions sont chargés.

De nouveaux débouchés

« Nous étions trois en 2000 et pas moins de 18 aujourd’hui. Il y a les salariés à l’administratif qui prennent les commandes, d’autres au centre de conditionnement, ceux dans les poulaillers et les chauffeurs. En montant en puissance, j’ai toujours voulu m’assurer de pouvoir garantir un outil de travail optimal et un service de qualité. Nous ne livrons pas de centrales d’achats pour préserver notre autonomie. Et, surtout, je veille à ce qu’aucun de nos clients ne dépasse 5 % du chiffre d’affaires de l’entreprise », poursuit André Bastady.

Forcément, depuis le début de la crise sanitaire, le quotidien a été bouleversé : l’hygiène et les gestes barrières ont été renforcés. Il a également fallu s’adapter à la fermeture des restaurants et autres hôtels. « Nous livrons davantage les grandes et moyennes surfaces. Les grosses centrales d’achat ne sont plus arrivées à suivre. Du coup, il y a eu parfois des problèmes d’approvisionnement. Cela nous a assuré de nouveaux débouchés. Les GMS locales et régionales sont plus flexibles et réactives. De notre côté, nous travaillons à un rythme plus soutenu. D’autant plus que cette crise sanitaire est arrivée dans une période où tous les bâtiments ne sont pas pleins. On est donc obligé d’aller chercher les œufs tous les jours et de faire de l’administratif », précise André Bastady.

 

 

Au total, l’entreprise a 300 clients, tout confondu. Pour les contrats avec les producteurs, le prix de l’œuf est indexé sur le prix de l’aliment. André Bastady s’est engagé avec eux sur douze années, à partir de 2018. Soit la durée de son prêt pour l’investissement dans son nouveau bâtiment. C’est son épouse, Katia, qui est la présidente de la SAS, André Bastady étant le gérant. « Nous cherchons encore un ou deux producteurs d’œufs en plein air pour s’assurer une quantité suffisante dans des périodes spécifiques comme actuellement. L’idée est également de se diversifier pour ne pas être dépendant d’un seul professionnel ou d’un seul magasin », conclut André Bastady.

Les + Prim’Vert

Réactivité : il faut passer commande avant 22 h pour être livré le lendemain.

Fraîcheur : moins de 48 h de la ponte à la livraison dans un rayon de 50 kilomètres.

Qualité : un service « qualité » contrôle les œufs pour un minimum de casse. Tous les œufs conditionnés et commercialisés proviennent uniquement de producteurs respectant la charte sanitaire. Ainsi, les locaux et les équipements, la gestion sanitaire, la protection des animaux et les mesures de biosécurité sanitaire sont garantis par plusieurs contrôles tout au long de l’année, effectués par les vétérinaires des services DDCSPP du Haut‑Rhin.

Proximité : les œufs 100 % Alsace sont pondus, triés et emballés à Michelbach-le-Haut.

Gaec St Jacques : À Feldbach, l’exploitant a mis en place un élevage de poules en plein air pour la ferme Prim’Vert. Les poules disposent d’un vaste espace extérieur où elles peuvent circuler librement. Dans un souci de qualité et de constance, elles sont nourries avec des céréales garanties sans OGM et une nourriture équivalente aux poules de la ferme Prim’Vert. Trois fois par semaine, les œufs sont ramenés au centre de conditionnement où ils sont rapidement triés et distribués.

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