Pratique

Taaka beer spa, à Strasbourg

Une bulle de bien-être unique en France

Publié le 22/02/2022 | par Anne Frintz

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Naomie Crawshaw et Paul Fruh, 26 et 27 ans, posent cinq jours après l’ouverture de leur spa à la bière, le premier en France. Ils sont rincés.
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Pas question de boire la tasse ! Ici, on se sert une (ou plusieurs) bière (s) pression artisanale (s) locale (s), dans son bain.
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On retrouve les mêmes ingrédients au verre et dans l’eau du bain. Leurs vertus sont identiques, qu’ils soient ingérés ou qu’on y trempe, pour la peau et l’esprit.
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Séance de sauna obligatoire, avant le bain à bulles, pour ouvrir les pores de la peau, afin qu’elle soit réceptive aux bienfaits du malt et de la levure de bière.
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Salle de relaxation : passage obligé, après le bain, pour se remettre de toute cette ébullition.
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Initiative de deux jeunes Strasbourgeois, le Taaka beer spa est le premier spa à la bière français. Naomie Crawshaw et Paul Fruh ont ouvert les robinets quelques jours avant la Saint-Valentin, mi-février, en plein cœur de la capitale alsacienne. Les associés dévoilent le concept et les coulisses de cette aventure entrepreneuriale.

Au Takaa beer spa, 6 rue Marbach, à Strasbourg, tout n’est que luxe, calme, volupté et convivialité ! Plongés dans un bain bouillonnant à 37 °C, infusé aux principaux ingrédients qui composent la bière – le houblon, la levure et le malt -, les hôtes se tirent des bières artisanales locales, à la pression, et trinquent, à leur santé ! Ils sont là pour un soin de la peau, conféré par le mélange odorant dans lequel ils se prélassent (surtout grâce à la levure de bière et au malt), mais aussi pour déconnecter, grâce aux vertus apaisantes du houblon, dans leur bain et dans leur verre. Pour ceux qui ne boivent pas d’alcool, une limonade au houblon de la microbrasserie Guth est servie. Après une demi-heure ou une heure de bain, selon la formule choisie, les couples, familles ou amis sortent de l’eau avec la peau douce ! Micropeeling et hydratation garantis.

Le spa à la bière

Le concept, venu tout droit de la République tchèque, a été importé, en Alsace, par Naomie Crawshaw et Paul Fruh, deux Strasbourgeois, fraîchement sortis de l’École de management de Strasbourg (EMS). Le couple avait été séduit, durant un voyage à Prague, par les spas à la bière tchèques, qui allient les passions de chacun : le spa pour Noémie, la bière pour Paul.

Dans la capitale alsacienne, les jeunes entrepreneurs proposent un parcours en trois étapes d’une heure à une heure trente : sauna, spa, salle de relaxation. Les quatre baignoires balnéo duo en bois du spa viennent de Tchéquie. Jusqu’à huit personnes peuvent donc profiter, face à face, des bains relaxants, en même temps… et en toute intimité ! Chaque séance est réservée, pour le confort de tous. Qu’on souhaite se délasser au calme ou rigoler, l’espace est dédié ; on peut se lâcher, seul, à deux, en groupe. Bien sûr, l’eau est renouvelée, après chaque client.

L’expérience est personnalisable, à souhait, sur simple demande préalable. Privatisation du lieu pour quelques heures, pétales de roses, plateaux de charcuterie, musiques (les droits sont payés à la Sacem), séances photos : presque tout est possible, sauf consommer de la bière en illimité. Les tireuses « libre-service » sont bridées… mais il y en a tout de même pour un bon litre par personne. Le spa, qui a la licence 4, est interdit aux moins de 16 ans.

Des produits locaux

Taaka beer spa est une entreprise locale qui mise sur le Made in Alsace. Taaka est la traduction de cigogne, en maori. Naomie et Paul désirent mettre en valeur leur région, sa culture, son terroir, à travers leur spa à la bière. Les matières premières sont donc alsaciennes et allemandes. Le houblon vient du Comptoir agricole, à Brumath. Ils ont choisi une variété éminemment fruitée. La levure de bière est achetée au groupe Lesaffre, à Strasbourg. Le malt, à une coopérative allemande, à Lahr : Malzfabrik Eckenstein. Les jeunes entrepreneurs réduisent les pellets de houblon et les céréales germées en poudre eux-mêmes, selon un protocole établi avec un laboratoire. Les ingrédients du spa sont conservés dans des bocaux hermétiques en verre.

La bière elle, est amenée à changer au fur et à mesure des saisons. Pour commencer, le couple, aidé d’amis qui ont dégusté à l’aveugle, a choisi une pils des Brasseurs du Ried, à Muttersholtz : « légère, parce qu’il fait chaud ici », certifie Paul. Environ 30 °C. Aucun contrat d’exclusivité ne le lie à l’une ou l’autre brasserie. Paul est gourmand, il n’a pas fini de tester.

 

 

Un parcours de plus d’un an

Les cofondateurs ont travaillé une année et demie, avant de voir leur projet enfin se concrétiser. À cause des retards de chantier, liés à la crise sanitaire, le premier spa à la bière français a ouvert près de trois mois après la date escomptée. « On a eu l’idée à Prague, en 2016. Et on n’a jamais arrêté d’y penser, confie Naomie. En 2021, on s’est dit que c’était le bon moment pour se lancer. On est jeunes, on est hébergé gracieusement à titre privé, on n’a pas d’enfants. Paul venait de finir son master. Moi, j’avais eu une première expérience chez Mars à Haguenau, qui ne débouchait sur aucun CDI. On était confinés ensemble. On avait le temps d’échanger et on avait besoin de nouveauté. » Naomie est titulaire d’un bachelor d’affaires internationales, option gestion de la chaîne logistique. Paul, son « filleul » à l’EMS, a le même diplôme, avec la spécialité négociation et management commercial.

Première étape du projet : benchmarker, c’est-à-dire, étudier ce que fait la concurrence, notamment les créateurs d’expériences insolites, à Strasbourg. Le Taaka beer spa est bien le premier spa à la bière de France. C’est un bon point. Les actuels gérants s’intéressent alors au potentiel du spa : qui seront les futurs clients, que cherchent-ils ? L’étude de marché faite, Naomie et Paul font la tournée des microbrasseries alsaciennes. Ils en découvrent une quinzaine. Ils intègrent ensuite l’incubateur à projets de l’EMS, La Ruche à projets, y montent notamment leur business plan, en participant à des ateliers. « Ça permet de récolter de précieux avis extérieurs », assure Naomie. En parallèle, ils démarchent les autres fournisseurs, trouvent leur lieu. Les travaux s’étaleront d’août 2021 à janvier 2022, avec une attention particulière sur la ventilation de la cave, l’assainissement et le chauffage de l’eau.

À 1 000 %

À la sortie de l’incubateur, les jeunes gens ont en main un business plan de 70 pages, à montrer aux différentes structures de financement. Naomie se remémore les propos de sceptiques : « ce sont des jeunes qui sortent d’école de commerce, ils veulent se faire mousser… » Pour démonter les jugements hâtifs, les idées reçues, rien de mieux qu’un dossier bien épais, qui prouve qu’ils sont « à fond », assure-t-elle. En une semaine, ils signent avec la Banque Populaire. « C’est l’humain qui prime », ajoute Naomie. Le conseiller croit en eux et au spa. À la clé, 200 000 euros de prêt bancaire. Ils bénéficient, par ailleurs, d’un prêt d’honneur d’Initiative Strasbourg, de 15 000 euros. La BPI garantit ces emprunts.

Au total, 300 000 euros sont nécessaires pour installer le spa. Les associés à 50/50 mettent 75 000 euros d’apport. La Région Grand Est subventionne le projet à hauteur de 5 000 euros, pour faciliter l’entreprenariat des jeunes. La campagne de financement participatif, contre bons cadeaux, pour acheter les tireuses à bière « bridées », dépasse toutes leurs espérances, puisqu’ils atteignent leur objectif à 1 000 % ! Cette manne permet de boucler le budget et d’avoir un peu de trésorerie, pour débuter.

La question en suspens

Nul doute que le Taaka beer spa, aujourd’hui, est déjà un succès. Après cinq jours d’ouverture, Naomie et Paul, qui n’ont encore aucun salarié, avaient déjà accueilli près de 200 personnes. « Je n’ai jamais autant fait le ménage de ma vie », souffle Paul, courbaturé. Les jeunes pensent à embaucher et rêvent de franchiser. Ils cherchent aussi une solution pour recycler l’eau des bains… riche en protéines, vitamines, antioxydants, elle serait réutilisable si, techniquement, elle pouvait être acheminée ailleurs. Dans le spa, impossible de la stocker. Aujourd’hui, elle s’écoule. Ce sont des milliers de litres d’eau usée perdus, chaque jour. « Ça nous tient à cœur de trouver comment la réutiliser », insiste Naomie. Heureusement, l’énergie de l’eau chaude d’un bain permet de chauffer celle du bain suivant.

 

 

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